COMMUNIQUE DE PRESSE


DE LA SOCIETE FRANCAISE DE CHIRURGIE PLASTIQUE RECONSTRUCTRICE ET ESTHETIQUE (SoFCPRE) et du SYNDICAT NATIONAL de CHIRURGIE PLASTIQUE RECONSTRUCTRICE ET ESTHETIQUE (SNCPRE) CONCERNANT LA CRISE DES PROTHESES PIP

 

 

Le jeudi 24 novembre 2011, la communication dans la presse et les médias du décès d’une patiente atteinte d’un lymphome malin alors qu’elle était porteuse de prothèses P.I.P. a entrainé une inquiétude importante chez les patientes porteuses d’implants, et chez les chirurgiens plasticiens français.

 

Après avoir compris la douleur et la peine des proches de cette patiente, auxquels la SoFCPRE et le SNCPRE adressent leurs plus sincères condoléances, la SoFCPRE et le SNCPRE tiennent à faire un communiqué. En effet dans cette période d’inquiétude, il convient de faire une analyse objective de la situation, basée sur un raisonnement et des faits scientifiques dans un esprit de transparence, de vigilance et de responsabilité, afin d’avoir la meilleure attitude possible pour les patientes porteuses de prothèses.ptose mammaire

 

En pratique, ce cas douloureux est complexe car il se situe à la jonction de 2 problèmes difficiles : La survenue potentielle et discutée de lymphomes sur prothèses, et l’affaire des prothèses P.I.P découverte en cours d’année 2010, non encore jugée, mais où l’escroquerie apparaît hautement probable.

 

Concernant la possibilité de survenue de lymphome sur prothèse :

 

 

 

une soixantaine de cas ont été rapportés dans la littérature internationale, faisant état d’association de cellules lymphomateuses avec des prothèses mammaires. Les lymphomes primitifs du sein sont des tumeurs rares représentant environ 0,5 % des tumeurs du sein et il est difficile de savoir s’il s’agit d’une coïncidence ou d’une association. Une communication a été faite sur ce sujet durant le 2

 

dernier congrès de la SoFCPRE et fera prochainement l’objet d’un article dans les Annales de Chirurgie Plastique et Esthétique. L’analyse de la littérature montre le caractère exceptionnel de ces lymphomes associés à une prothèse. En effet, 60 cas ont été répertoriés par la FDA pour plus 6 millions de patientes porteuses de prothèses, et 75 cas ont été répertoriés au niveau mondial pour environ 10 millions de patientes porteuses de prothèses selon la Confédération internationale des Sociétés de chirurgie plastique reconstructrice et esthétique (IPRAS). En outre, la littérature témoigne du caractère habituellement peu agressif puisque dans de nombreux cas publiés, il a suffi de réaliser une capsulectomie (ablation de la capsule qui entoure la prothèse) et un changement d’implant pour régler le problème. D’autres cas ont bénéficié d’une chimiothérapie ou de radiothérapie. Sur les 75 cas qu’elle a retrouvés, l’IPRAS a recensé 5 décès, toutes les autres patientes ont guéri après traitement. Ce qui permet d’établir le risque de lymphome à grande cellule à 1 pour 130 000 et le risque de dégénérescence maligne à 1 pour 2 000 000. Les prothèses PIP ne sont pas spécifiquement concernées dans les cas à l’étranger. La cause des 5 décès recensés est encore inconnue et résulte vraisemblablement de l’association de plusieurs facteurs rares, dont vraisemblablement une prédisposition génétique.ptose mammaire

 

Si l’analyse histologique complémentaire et la relecture des lames d’anatomopathologie, concernant le cas PIP considéré, confirmaient qu’il s’agit d’un lymphome malin anaplasique à grandes cellules (type histologique des lymphomes potentiellement associés aux prothèses), il s’agirait alors du premier cas français associant un lymphome malin à une prothèse mammaire et ayant entrainé un décès de la patiente. Dans ce cas, s’il restait isolé, il serait difficile d’avoir un avis définitif de causalité entre la survenue du lymphome et la prothèse PIP car le lymphome anaplasique à grandes cellules (tumeur maligne du système lymphatique) peut survenir sans prothèse et en n’importe quel endroit de l’organisme. Il apparaît fondamental de bien recenser l’éventuelle apparition d’autres cas de lymphomes chez des patientes ayant eu des prothèses. A cet égard, la SoFCPRE a fort heureusement mis en place en cours d’année dernière une cellule de vigilance, et demande expressément à tous les chirurgiens français de déclarer à cette cellule et à l’AFSSAPS tout cas de lymphome sur prothèses. Enfin il est important de noter qu’environ 1/3 des cas publiés sont survenus sur des prothèses gonflées au sérum physiologique, si bien que la responsabilité du gel de silicone pourrait ne pas être directement impliquée, mais plutôt celle de l’enveloppe.

 

Concernant la très probable escroquerie des prothèses PIP

 

 

 

, l’AFSSAPS (Agence Française de Sécurité Sanitaire des produits de santé) a mis en évidence en 2010 une augmentation du nombre de ruptures de prothèses concernant la marque des prothèses PIP (Poly Implant Prothèse). Ce taux de rupture anormal des prothèses PIP a conduit à une inspection par l’AFSSAPS sur le site de la Société PIP qui a mis en évidence de sérieux dysfonctionnements aboutissant à la décision de retrait des prothèses de cette marque, par une décision du 29 mars 2010. Dés le début de cette crise , la SoFCPRE, scandalisée par cette tromperie industrielle, a adopté une attitude responsable et efficace : elle a rapidement élaboré un plan d’action 3

 

immédiat qu’elle a adressé aux chirurgiens plasticiens français, a élaboré un « questions-réponses », pour les patientes, de façon à permettre des réponses claires et précises aux patientes appelant auprès des secrétariats des chirurgiens plasticiens, enfin elle a proposé un modèle de lettre pour les patientes que les chirurgiens ayant implanté des prothèses PIP, devaient adresser à leurs patientes. Durant toute cette période de crise, la Société Française de Chirurgie Plastique Reconstructrice et Esthétique a travaillé de façon exemplaire avec l’AFSSAPS en essayant de définir une conduite à tenir précise et raisonnée dans un esprit de responsabilité avec comme souci l’intérêt des patientes.

 

D’après les éléments dont on dispose actuellement, il semble que certains lots de prothèses PIP soient de qualité satisfaisante et d’autres de mauvaise qualité, puisque pour ceux-ci le gel de silicone de qualité médicale a été remplacé par un gel de silicone de moindre qualité, ce qui engendre un risque de rupture prématurée. Malheureusement, personne ne dispose de fichier permettant de connaître les patientes porteuses de prothèses satisfaisantes et celles porteuses de prothèses défectueuses. En 2010 La SoFCPRE avait recommandé une surveillance accrue des patientes porteuses de prothèses PIP, et un changement sans urgence des prothèses. Du fait de la survenue de ce cas de lymphome, le principe de précaution peut faire poser la question de proposer le changement systématique des prothèses de marque PIP à moyen terme. Concernant les autres marques de prothèses, il n’y a actuellement, à la connaissance de la SoFCPRE, aucune alerte par rapport aux autres prothèses. Les autres fabricants présents sur le marché avaient spontanément adressé en 2010 des courriers justifiant la qualité de leur produit et en particulier la qualité du gel utilisé. Face aux conséquences de l'escroquerie de PIP, la SoFCPRE a voulu dès le printemps 2010 que soit augmentée la sécurité des dispositifs médicaux. Elle s'est donc rapprochée de l'AFSSAPS pour proposer son aide et a créé sa Cellule de Vigilance qui permet désormais une analyse au cas par cas et au fur à mesure des déclarations des plasticiens. Ceci pour permettre d’obtenir une alerte très précoce en cas de survenue d’un produit défectueux.

 

La SoFCPRE et le SNCPRE recommandent :

 

Pour les patientes :

 

 

 

 

Dans tous les cas et en particulier si elles constatent un signe anormal, les patientes porteuses de prothèses PIP doivent consulter leur chirurgien pour envisager concrètement leur suivi, leur éventuel changement de prothèses même en l’absence de signe de détérioration de la prothèse, ou l’attitude la plus adaptée. Pour les patientes ne souhaitant pas envisager de changement de prothèses, un suivi clinique et échographique tous les 6 mois est recommandé, avec changement de prothèse au moindre doute. Pour les patientes qui ont eu recours à l’explantation de leurs prothèses PIP, l’AFSSAPS ne recommande pas de suivi particulier. En cas de survenue d’un éventuel syndrome tumoral au niveau du sein ou de la région axillaire, la patiente doit consulter et faire pratiquer une échographie avec microbiopsie de la zone tumorale. 4

 

Pour les médias :

 

 

 

la SoFCPRE et le SNCPRE recommandent la prudence sur ce sujet difficile et sensible. Une vigilance renforcée a été mise en place, et il convient de ne pas donner des informations contradictoires ou scientifiquement erronées source d’inquiétude et de panique pour les patientes. En effet seul l’intérêt des patientes doit guider notre attitude, qui doit être la plus sérieuse et la plus sereine possible. Le sein étant un organe très symbolique, l’anxiété des patientes peut être très importante, et il ne paraît pas souhaitable d’augmenter le traumatisme psychologique des patientes par une attitude peu responsable. De nombreuses coïncidences vont survenir chez les 30 000 patientes ayant eu des prothèses PIP : 1 sur 10 développera un cancer du sein (comme le reste de la population), d’autres auront des maladies cardiovasculaires ou des accidents de la circulation. Il conviendra de remettre tous ces évènements ou accidents de la vie en perspective avec la population normale dans le cadre d’études de cohorte, sans diaboliser de façon outrancière et non scientifique ces évènements associés aux patientes porteuses ou anciennes porteuses de prothèses PIP.

 

Pour les chirurgiens :

 

 

 

La SoFCPRE et le SNCPRE recommandent une vigilance accrue. Tout épanchement péri-prothétique anormal devra faire l’objet d’une analyse avec ponction sous échographie et analyse cytologique recherchant des cellules lymphomateuses de type cellules lymphomateuses anaplasiques à grandes cellules porteuses de l’Ag CD30. Tout syndrome tumoral sur un sein devra faire l’objet d’un contrôle échographique avec micro-biopsie sous échographie pour vérification histologique. La SoFCPRE et le SNCPRE demandent instamment à tous les chirurgiens français de déclarer toute association entre un lymphome et une prothèse mammaire afin d’avoir un recueil exhaustif des données.

 

Concernant les prothèses PIP :

 

 

 

la SoFCPRE recommande un suivi rapproché et un changement des prothèses, à réaliser sans urgence. Ce changement doit maintenant être concrètement envisagé entre la patiente et son chirurgien, et doit être planifié à moyen terme.

 

Concernant la prise en charge financière

 

 

 

, pour la Chirurgie reconstructrice, l’Assurance Maladie prend en charge après entente préalable, l’ablation de l’implant et le renouvellement de l’implant. Concernant la Chirurgie Esthétique, l’Assurance Maladie prend en charge, après entente préalable, l’ablation de l’implant mais ne prend pas en charge la remise en place d’un nouvel implant, qui est à la charge de la patiente, notamment les frais de bloc et de clinique. Un accord doit être trouvé entre la patiente et son Chirurgien pour les honoraires du chirurgien et de l’anesthésiste, qui devront être modérés pour faire face à cette situation exceptionnelle et non prévue, qui constitue une escroquerie scandaleuse, mettant en difficulté et en souci la patiente et son Chirurgien. Le fabriquant ayant fait faillite, les recours possibles contre lui seront certainement difficiles ; et le mieux est que chacun fasse un effort pour sortir de cette situation stressante et injuste (l’escroquerie étant injuste par nature) pour tout le monde. A cet égard, la SoFCPRE et le SNCPRE recommandent à leurs membres d'apprécier les situations de chaque patiente avec tout le tact et toute la mesure nécessaires.

 






Enfin, nous rappelons que si cette crise fait l’objet de la plus grande attention de la part de la SoFCPRE et du SNCPRE, l’intervention d’augmentation mammaire par prothèses reste une intervention sûre, qui donne habituellement de très bons résultats, et qui constitue une source de qualité de vie et de satisfaction pour la grande majorité des patientes..

Jean-Claude GUIMBERTEAU


Président de la SoFCPRE

 

 

 

 


Bruno ALFANDARI


Président du SNCPRE